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Contexte
Une vie plus loin
Labyrinthe
Les autres



 

Quand Brunelle pénétra dans l’appartement le soleil rouge frôlant l’horizon perçait par endroit la brume opaque de la pollution pendant que l’obscurité gagnait sur la ville. Dans une heure il ne ferait pas bon traîner dans les rues de Denver. Janéa était prête. Elle avait enfilé un jean, des chaussures plates pour pouvoir courir le cas échéant et un chemisier bleu nuit. Brunelle, brune au regard noir, élancée, avait fait le contraire. Elle avait une magnifique mini jupe jaune, un corsage assorti très échancré et une paire de chaussures rouges à talons très haut. Cela faisait partie de la mise en scène.
—            Toujours décidée ? interrogea Brunelle d’un ton faussement amusé pour masquer sa nervosité.
—    Je n’ai pas le choix, répondit Janéa en passant derrière le bar. Femme esclave c’est pas mon truc et je n’ai rien à perdre. Au contraire.
Brunelle ne répondit pas. Elle n’était pas tout à fait dans le même cas de figure que sa copine. Un peu plus âgée elle était issue d’une famille aisée qui pour être plus libre l’avait placée dans un pensionnat universitaire. Elle avait tout à condition de ne pas encombrer ses géniteurs. C’est en fréquentant la même université que les deux jeunes filles s’étaient connues se découvrant des points communs. Sa famille ne lui accordant aucune attention, Brunelle voulait brûler la vie par tous les bouts pour exister.  Elle s’ennuyait à mourir et sa rencontre avec Janéa avait créé un appel d’air vers l’aventure. Au départ, les deux jeunes filles s’étaient amusées à faire des virées en voiture en toute innocence puis à allumer les hommes. Au fil du temps, Brunelle avait voulu pimenter leurs sorties ce qui n’avait pas déplu à Janéa. Brunelle et Janéa se mirent à provoquer les bandes de garçons. Leur plaisir consistait en de folles poursuites dans les rues chaudes des zones mal famés de Denver. Provoquer les petits cons, comme disait Brunelle, lui donnait la sensation d’exister. Les deuxfilles étaient très rapides dans la course à pieds et se faisaient fortes de semer les bandes, souvent diminuées par l’usage de stupéfiants dont la droline, un dérivé de mandrone, nouvelle drogue totalement chimique.Ce jeu du chat et de la souris pouvait durer une bonne partie de la nuit.
 Alors que Janéa se cachait derrière l’aspect d’une fille tranquille Brunelle était provocante en permanence. Que ce soit dans la rue ou dans l’université, elle avait un besoin de reconnaissance. A tout moment, elle voulait que chacun soit conscient de sa présence. Pour Janéa c’était un peu différent. Elle ne s’était jamais remis d’un amour d’adolescence qui avait laissé des traces. Bien que ne voulant pas heurter sa famille d’accueil, les jeux proposés par Brunelle avaient eu un attrait plus fort que tout. Elle avait pris goût à se mettre en danger la nuit venue ; pour le plaisir de l’adrénaline. Peut-être aussi pour oublier son désarroi. Au fil du temps, ces montées de tensions extrêmes lui étaient devenues nécessaires et elle suivait Brunelle avec plaisir.
—    Le garde du corps attend en bas, fit Janéa en versant un fond d’alcool dans les deux verres. C’est un nouveau, la trentaine. Il travaille pour Mos depuis deux mois. Un français, je crois. Il a un léger accent.
—            J’essaierai de me surpasser, répondit Brunelle en prenant son verre.
Les deux jeunes femmes burent le fond d’alcool en silence pour se donner du courage. Au pire l’une se verrait enfermée dans une résidence secrète et l’autre serait priée de changer de ville.
—    En cas de pépin tu as le numéro de mon portable, fit Brunelle. N’hésite pas à m’appeler. Quoi qu’il arrive je serais toujours là.
Le mariage forcé de Janéa l’avait déstabilisée. Cela lui avait donné une vision négative de la société où ce genre de choses pouvait se passer en toute indifférence. Pour l’instant elle évitait toute vie commune avec qui que ce soit pour garder sa liberté. Elle avait quitté l’université deux mois après le départ de sa copine sans se préoccuper des diplômes. Son intelligence lui avait permis de trouver un bon job rapidement. Dans la vie pratique américaine il fallait d’abord savoir travailler.
—    Un double de la voiture de Tom, reprit Brunelle en tendant une clef plate à Janéa.
Puis elle lui fit mémoriser la couleur du véhicule et le numéro des plaques. Janéa répéta plusieurs fois modèle, couleur et numéros. Quand tout fut au point, elles descendirent rejoindre le chauffeur dont le regard vacilla légèrement en découvrant Brunelle. S’apercevant de son trouble la jeune femme donna un coup de coude à Janéa. L’homme était prenable, c’était bien un frenchy. Prétextant qu’elle avait mal au cœur sur le siège arrière Brunelle prit place aux côtés de Chignole. Pendant le trajet qui les emmenait au concert elle plaisanta avec lui histoire de se le mettre dans la poche.

 

Mariée par obligation à un lieutenant de son père Janéa Neruda décide avec l’aide du fils d’une amie de sa mère de s’émanciper du milieu de la drogue dans lequel elle est née et de tenter une nouvelle vie dans un autre état.
Peut-on quand on est la femme du maffieux le plus important de Denver échapper à son destin ? Tout au long de sa cavale elle rencontrera des gens qui l’aideront et d’autres qui feront tout pour qu’elle échoue dans sa tentative. Ce qu’elle ne sait pas c’est qu’elle a déjà vécu dans d’autres vies et que ses ennemis d’hier croiseront de nouveau son chemin. Et puis il y aura cet homme étrange rencontré au hasard sur les bords d’un point d’eau desséché. Semblant tout connaître de son lointain passé il essayera de l’aider. Janéa l’écoutera-t-elle ?